Un fils écrasé par la mémoire d'un père adulé de tous. Une employée rongée par le poids des mensonges.
En cette fin de journée, l'effervescence règne dans la maison des Franck pour la présentation publique de la première oeuvre poétique de Friedrich, fils du célèbre poète Karl Amadeus Franck, véritable légende portée aux nues par son épouse et sa biographe Clarissa von Wengen.
Écrasé sous le poids de cette figure paternelle, par cette gloire qui le réduit à néant, terrifié par le regard sans pitié des bourgeois et intellectuels de la haute société, Friedrich ne supporte plus de devoir suivre les traces de ce père vénéré de tous.
C'est alors que la vérité sur son père lui est enfin dévoilée : Karl Franck n'a jamais été ce grand homme que le monde connaît. La partie obscure et basse de son être a volontairement été cachée, et Clarissa manipulée pour y parvenir.
Le lourd passé de l'écrivain refait surface, anéantissant les non-dits et rétablissant la lumière sur les souvenirs épars d'un fils qui ne demande qu'à aimer à nouveau un père tout simplement humain.
Ce que l'on sait les uns des autres, ce n'est jamais que par l'amour Stefan Zweig
NOTE D’INTENTION
Ainsi Légende d’une Vie nous transporte dans cette haute société du début du 20ème siècle, Zweig mentionnant lui-même dans sa préface que quelques éléments biographiques des vies de Hebbel, Wagner ou encore Dostoïevski lui avaient servi de modèle. Légende d’une Vie met en scène, à travers un texte fluide et des personnages à la psychologie complexe, de nombreux thèmes chers à Zweig : la sacralisation à l’excès de l’artiste, la création et sa liberté, la construction de l’identité d’un individu, la famille et ses secrets, le pouvoir ou encore l’avortement.
Nous avons donc ici un texte d’une rare richesse et densité, caractéristique du travail de Zweig, ce « chasseur d’âmes » selon la formule de Romain Rolland, qui n’aura de cesse de tenter de découvrir les secrets enfouis, les grandes passions, de révéler ce qui est caché, de mettre à jour les raisons profondes qui conduisent les individus à tel ou tel comportement. Et c’est tout l’intérêt de la pièce et de son adaptation. En effet, ce qui intéresse Zweig, et on le voit parfaitement ici, c’est avant tout le mystère de l’être humain et plus particulièrement ses contradictions, le jeu entre d’un côté les pulsions, les forces qui le dirigent mais qu’il ne connaît pas, et de l’autre sa réflexion, son action. En effet dans Légende d’une Vie comme dans l’ensemble de l’œuvre de Zweig, une infinité de secrets pèsent sur le héros. Ces secrets seront révélés tout au long de l’intrigue, éclaircissant les comportements des différents protagonistes et leurs contradictions. Comme Zweig l’écrit dans Vingt-quatre heures de la vie d’une femme, l’individu est livré « à des puissances mystérieuses plus fortes que sa volonté et que son intelligence ». Ainsi les personnages sont-ils en quête de leur propre identité, Friedrich, écrasé par le poids de la figure paternelle, Clarissa, écrasée par la pression de son employeur et le poids du secret, Maria, Léonore, Karl, eux-mêmes perdus dans leurs solitudes affectives. La parole devient libératrice et la crise possibilité de faire bifurquer, basculer le destin des personnages, dans une perspective tout à fait goethienne du stirb und werde (meurs et deviens).
Mais Zweig dénonce également la rigueur du conformisme moral de cette société bourgeoise qui empêche le héros de s’épanouir et dans laquelle les femmes sont les premières victimes. En outre les relations entre les personnes se développent comme autant d’affrontements hypocritement courtois mais en réalité implacables. L’autre n’existe que comme l’objet d’un désir, l’enjeu d’une lutte, en l’occurrence dans la pièce Friedrich contre son propre père.
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